Génocide ézidi dans l'empire ottoman
Dans le nord-est de l'empire ottoman, sur les ordres des autorités ottomanes, nous avons eu le même sort que les Arméniens victimes d'horribles massacres dans des pogroms. A la suite de cette
violence, des centaines de milliers de Ezidis ont été tués. Seule une petite partie d'entre eux a réussi à échapper aux troupes ottomanes et a trouvé refuge en Arménie et en Géorgie.
C'est un crime oublié par tout le monde sauf par les Ezidis. Depuis toujours les Ezidis habitaient cette terre conquise par les Ottomans qui les ont forcés à se convertir à
l'Islam. Ils considéraient notre religion comme hors la loi.
A la fin du XIX° et au début du XX° siècle, à la suite de la guerre russo-turque, les régions de Wan, Bayazid, Kars, Surmalu, peuplées principalement de Ezidis,
d'Assyriens, d'Arméniens et de Kurdes ont été conquises par les troupes russes et les Ezidis ont été placés sous la protection des autorités militaires russes qui ont montré leur tolérance religieuse
et leur ont fourni toute l'aide possible. Certains Ezidis ont combattu dans les forces arméniennes et avec l'empire russe contre l'armée ottomane.
En 1917, après la révolution en Russie, l'armée russe a quitté la zone occupée. A la suite du retrait de la Russie, les troupes ottomanes ont repris possession des terres et
recommencé la guerre religieuse contre les Ezidis, les Assyriens et les Arméniens. Elles ont attaqué les villages ézidis, les ont pillés et incendiés, ont massacré des civils sans épargner les
personnes âgées, les enfants, les malades. Ils ont violé femmes et filles et les ont emmenées avec eux. Les routes étaient jonchées de cadavres, des enfants abandonnés par leurs parents, des malades
et des vieillards tombaient sur la route. Les réfugiés mouraient de faim et de maladie.
Un héros national ézidi, Djangir Ahga, a organisé la résistance armée contre les troupes musulmanes. Pendant quelques mois, les troupes ézidies, mal armées, ont combattu héroïquement contre les forces gouvernementales et les milices musulmanes locales. Cependant le rapport de forces étant inégal, les Ezidis ont été forcés de fuir pour échapper à la persécution de leur ennemi cruel et perfide. Le chef militaire Andranik Pacha écrit dans ses mémoires : « Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi courageux que Jahangir Agha. » Ce dernier et Andranik Pacha sont devenus des héros des peuples Arménien et Ezidi. Aujourd'hui, la région est peuplée en majorité de kurdes car certaines tribus kurdes ont soutenu l'empire ottoman.
Dans la région de Sinjar au nord de l'Irak, où vivaient principalement des Ezidis, l'empire ottoman a lancé des campagnes d'extermination et d'islamisation forcée.des milliers de personnes ont été massacrées à : Sinjar, Sinun, Goba, Dgur, Gali Ali Bagh, Dhok, Zorava, Kars, Bare, Shiba, Tlizer, Tlzafe, Hrabde Kavala, Grzark, Rmbusi, Sharok, Tlkazar, Tlbarka, Kocho hotmylo, Rndavan.
Un héros national ézidi, Féqir Hamo Sero, a organisé la résistance de plusieurs tribus du Sinjar et remporté plusieurs succès dans la lutte contre les Ottomans. Pendant le génocide arménien, il
a accueilli sur ses terres plusieurs milliers d'Arméniens et d'Assyro-chaldéens (dix mille chrétiens). Il a obtenu le soutien des Britanniques et a participé au soulèvement kurde à Barzan.
Les Ezidis se sont toujours battus pour défendre leurs terres et leur liberté. On espère que la justice historique sera établie et qu'elle condamnera le génocide des Ezidis. Il y a exactement 100 ans, en 1914-15, l'empire ottoman a assassiné des Ezidis pour les convertir à l'Islam et l'histoire se répète aujourd'hui en Irak.
D'autres sources.
Revue d'Histoire Arménienne Contemporaine.
Tome IV - 2002 MARDIN 1915 Yves Ternon .
[ Al quçara, tr. B., p.
440 ]
Mikhaïl Salbo, le syriaque, nous rapporta : « J’ai fabriqué des selles dans les tentes au pied de la montagne de Sindjar jusqu’à l’été 1916. J’ai vu passer des convois d’Arméniens qui ont été
encerclés dans les villages de el-Ouardieh, el-Jadala, Abhara, el-Haoul, Aïn el-Ghazal, Balad, Amo, Tarik el-Badih etc. Avec trois Yézidis je suis allé de nuit au village Oum el-Diban repêcher 17
hommes, 12 enfants, 27 femmes et trois ânes et nous les avons amenés à Hammo Chero, le cheikh généreux du Sindjar, qui nous remercia et nous incita à en ramener d’autres. Un jour, j’ai rendu visite à
Mohamed Bebb, le musulman. Il m’a dit qu’il a enlevé trois femmes arméniennes pour lui et ses deux frères et qu’elles sont d’une grande beauté. J’ai patienté jusqu’à la nuit. Je suis allé voir mes
amis Yézidis. Nous nous sommes rendus de nuit à la demeure de Mohamed. Nous étions 22. Nous avons appelé ces trois femmes l’une après l’autre et les avons amenées au cheikh du Sindjar qui nous
remercia. L’une s’appelait Esther – c’était l’épouse de l’intendant des tabacs à Adana ; la deuxième s’appelait Lucia, la troisième Khatoun. Toutes trois rejoignirent les autres chrétiens du Sindjar.
Les Arabes enlevèrent 16 personnes à un convoi de plus de 3 000 réfugiés venu de el-Ahsaja, entouré de soldats et de Tcherkesses de Deir-es-Zor. Ils payèrent pour chacun un cheval blond et vingt
liras, et ceci en ma présence. à ce moment, Khadr el-Koussouma est arrivé. Ses mains et ses vêtements étaient couverts de sang. Il dit aux soldats : « Que Dieu en soit témoin ! Aujourd’hui j’ai tué
62 hommes, j’ai éventré trois femmes avec mon épée et trouvé dans leur ventre plus de trente livres. J’ai choisi deux belles filles qui disent être de Smyrne et je les ai emmenées chez moi. La nuit,
quand je suis entré dans l’une d’elles, j’ai vu dans sa natte un diamant, dix-sept livres et une boîte d’argent contenant soixante-douze pierres précieuses où figuraient des animaux, un scorpion, un
lion, un puma, un éléphant». Un jour, comme j’allais le voir, il me montra ce butin, ainsi qu’une croix d’or sertie de pierres précieuses ».
Chapitre V
Naufragés et rescapés.
S’il est bien difficile de faire la part de la légende et de la vérité dans les pratiques et les rites des Yézidis, il est par contre établi que le Sindjar est, pendant la guerre mondiale, le seul
lieu de refuge pour les Arméniens parvenus en Mésopotamie, le seul endroit où ils sont assurés d’être accueillis et protégés. Un seul homme, Hammo Chero – Chero, de la tribu Hammo –, le maître du
Sindjar, en dépit des risques qu’il court, reçoit, installe et nourrit des centaines de chrétiens, des Arméniens en majorité. Il est le principal artisan de leur survie. La plaine autour du Sindjar
est parcourue par les tribus arabes des Taï et des Chammar qui, surtout les Chammar, participent aux massacres et aux pillages. Dès 1914, des déserteurs chrétiens gagnent le Sindjar pour fuir la
conscription. Lorsqu’au printemps 1915, les nouvelles des massacres se répandent dans le vilayet de Diarbékir, des jeunes gens continuent de se réfugier au Sindjar où le cheikh Hammo Chero les
accueille généreusement. Il leur réserve des maisons et des tentes et les nourrit. C’est ainsi qu’en juin, Monseigneur Maloyan se voit offert de gagner le Sindjar, proposition qu’il rejette pour
demeurer au milieu de ses fidèles. Monseigneur Addaï Scher, évêque chaldéen de Séert, accepte, mais il est reconnu et tué39. Au début de juillet, les réseaux d’évasion vers le Sindjar s’organisent,
<p.233> à partir de Nisibe et de Ras ul-Aïn. Les convoyeurs sont des Arabes ou des Circassiens. Ils se font payer, mais, en règle générale, ils respectent leur contrat – à quelques exceptions
près, comme celle de Youssef Khoderchah [récit M. 6b]. C’est ainsi qu’à partir du printemps 1915, plusieurs centaines de chrétiens affluent au Sindjar sans être refoulés.
Les récits des rescapés montrent ce que représentait pour eux le Sindjar et dans quel état ils y parvenaient : « Touma, fils de Raphaël Boussik, fuit Véranchéhir vers le Sindjar. Les Kurdes de
Hussein Kandjo le traquent et le blessent à l’épaule, mais il parvient à leur échapper et à se réfugier chez les Arabes de la tribu Ansarieh. Lorsqu’il tente de gagner le Sindjar, un Kurde le repère
: il est à nouveau blessé, mais il parvient au Sindjar. Là, il est atteint du typhus. Il survit encore quelques mois et meurt à trente-neuf ans… »40
« [Rachel Hadji-Youssoufian, de Sis, est dans un convoi de déportés de Mardin. L’une des rares survivantes de son convoi, elle vit dans la tente d’un cheikh arabe et le supplie de la conduire au
Sindjar. Le cheikh accepte, mais il exige que son fils de seize ans, sa fille de huit ans, ainsi que sa sœur et sa nièce restent auprès de lui. Elle peut néanmoins partir avec ses plus jeunes
enfants]… Notre hôte arabe nous emmena à Zendjar-Dagh [Sindjar]. Il s’y trouvait une tribu de Yézidis qui nourrirent plus de 200 Arméniens, filles, femmes, hommes qui s’étaient tous échappés de chez
les Arabes. Comme j’avais des petits enfants, ils me donnèrent une maison séparée : c’étaient des gens extrêmement généreux. Mais où qu’ils soient, les Arméniens rencontraient le malheur. Une famine
terrible se produisit. Nous avons vécu pendant quatre mois en mangeant de l’herbe. Nous savions qu’en restant là nous allions mourir de faim. Aussi avons-nous pris nos enfants sur le dos et avons
nous repris notre route… »41
« Yakoub, le fils de Saïd Terzibachi, a sept ans. Il est déporté avec sa mère et sa sœur dans un convoi de 200 personnes. Tous sont jetés vivants dans une citerne, à l’exception des trois Terzibachi
– la mère, Suzanne, la fille, et Yakoub – qui se sont réfugiés dans une citerne vide. Ils voient les assassins jeter du bois et de la paille sur les corps entassés, verser du pétrole et y mettre le
feu. Avec quelques personnes que le feu n’a pas atteint, ils sont les seuls rescapés. Des Arabes viennent, leur lancent des cordes et les sortent de la citerne. Ils en égorgent quelques-unes et
jettent les autres dans une autre citerne. Il ne reste que cinq femmes et le petit Yakoub. Sa sœur est parvenue à s’enfuir jusqu’aux tentes des Arabes du Khabour après avoir mangé de l’herbe pendant
six mois. Son oncle, <p.234> Abdelmassih, la trouve et l’amène à Deir-es-Zor. Suzanne et Yakoub errent dans le désert : elle est blessée à l’épaule ; lui à la tête. Ils gagnent le Sindjar. En
1918, elle ramène son fils à Deïr es-Zor, retrouve sa fille et tous trois partent à Alep42 » [voir également récit Si 1].
Le père Joseph Tfinkdji, prêtre chaldéen de Mardin, parvient au Sindjar le 5 octobre 1915, alors qu’une épidémie de typhus éclate. Des cheikhs yézidis, craignant la contagion, contraignent les
réfugiés à quitter leurs maisons. Ainsi, le cheikh Achour de Mamissa regroupe tous les chrétiens en un seul lieu pour qu’ils y meurent. Apprenant cela, le cheikh Hammo convoque Achour et lui propose
de diviser le village en deux parties : on regrouperait les habitants dans une moitié jusqu’à ce qu’ils guérissent. Il est cependant difficile de soigner les malades, le Sindjar étant coupé de
Mossoul et de Mardin où l’on pourrait se procurer des médicaments. Vingt personnes meurent, en dépit des soins que leur prodigue le père Tfinkdji qui prend des risques, transportant lui-même les
cadavres pour les enterrer. Achour et les habitants de Mamissa décident de chasser les chrétiens. Hammo Chero les accueille et leur réserve un emplacement sur une colline en face de son village. Ils
y construisent des cabanes en chêne pour s’abriter provisoirement, en attendant l’hiver. Il les aide à construire des maisons en briques. Ils ont même un lieu de prière où le père Tfinkdji célèbre
des offices. En mars 1916, des convois arméniens partis de Cheddadé et de Deir-es-Zor arrivent au pied du Sindjar. Ils doivent disparaître dans le désert de Mésopotamie. Des Yézidis attaquent le
convoi. Ils enlèvent les femmes et les enfants et les confient aux chrétiens réfugiés dans leur montagne. Ces enfants sont agonisants : sans vêtements, nu-pieds, affamés, squelettiques. Les chrétiens
les soignent et remercient leurs hôtes de les avoir sauvés. Un petit groupe de Mardiniens, rescapés de Cheddadé, arrive au Sindjar. Parmi eux se trouve Suzanne, la femme de Saïd Terzibachi. Elle est
incapable de parler, tant elle a souffert. Les chrétiens la soignent et elle retrouve la santé. Ce sont 300 Arméniens qui en mars 1916, sont accueillis au Sindjar.
Le nombre des réfugiés augmente sans cesse. Ils partagent ce qu’ils ont et collectent de l’argent pour les nouveaux arrivants. Parmi les donateurs, quelques notables : Elias Malo, Abdelkarim
Karagulla, Elias Chouha [homonyme d’Elias Chouha, mort le 11 juin 1915]. Lorsque l’été arrive, ils travaillent dans les vergers et les vignes pour gagner de quoi survivre. Certains font parvenir à
Mardin des lettres à leurs familles pour se faire envoyer des aiguilles, du sucre et de l’argent. Ils vont alors d’un village à l’autre les échanger contre du blé, de l’orge, des lentilles
<p.235> pour eux et les nouveaux arrivants. Mais le prix des céréales augmente de façon exorbitante en raison de la spéculation à Mossoul. La montagne est menacée de famine. Les Arméniens se
rendent alors chez les Arabes de la tribu Taï, au mépris des risques encourus, pour se procurer les céréales nécessaires à leur survie. Hammo Chero admire leur solidarité. Il s’étonne de les voir se
procurer des vivres alors que les Yézidis qui ont des terres et les cultivent manquent de céréales. Certains Yézidis décident de voler la nourriture des chrétiens. Hammo Chero les en dissuade. Il
fait annoncer par le crieur public que « celui qui usurpe ou vole quelque chose aux chrétiens sera exproprié et exilé » et il met sa menace à exécution.
En octobre 1916, le père Tfinkdji décide de rentrer à Mardin. Il se fait remplacer par un laïc, Fardjallah Kaspo. Hammo Chero lui promet de continuer à protéger les chrétiens et à les secourir
selon ses moyens. Ainsi un lieu de culte improvisé permet aux chrétiens réfugiés dans le Sindjar de se réunir et de célébrer des offices sans prêtre. Les chrétiens respectent les coutumes des Yézidis
: ils s’interdisent de blasphémer, d’évoquer le diable, de boire de l’alcool. La colonie construit soixante maisons, dont une plus grande aménagée en hôpital. Fardjallah dirige la communauté : il
rassemble les dons et les aumônes, organise les soins, collecte les vivres et les distribue. Malade, il meurt quelques mois après.
Au printemps 1917, après la prise de Bagdad par les Anglais, des Arabes montent au Sindjar proposer aux chrétiens de les conduire à Bagdad moyennant trois livres par personne. 30 Mardiniens les
suivent. Ils atteignent Bagdad et font parvenir des messages à leurs amis pour les rassurer. De même des nouvelles parviennent de Mardin : des parents disent aux réfugiés du Sindjar qu’ils peuvent
rentrer, que le risque est moindre. La plupart des réfugiés hésitent à quitter le Sindjar. Au cours de l’été 1917, certains se rendent à Tel Alif, El Derbassieh pour être employés au chemin de fer,
dont la construction se poursuit et gagner de l’argent pour aider leur famille réfugiée dans la montagne.
En mars 1918, un corps d’armée ottoman est au pied du Sindjar, résolu à en finir avec ce réduit rebelle. Le commandant ottoman exige d’Hammo Chero qu’il lui remette ses armes et les chrétiens qu’il
protège. Le cheikh est indigné : il ne peut livrer des personnes auxquelles il a promis son hospitalité : « C’est une question d’honneur. Je ne rendrai personne tant que mes yeux verront. Après que
moi et mes enfants auront été égorgés, que les Turcs fassent ce qu’ils veulent. Le commandant demande nos armes. C’est stupide. Si nous les lui remettions, nous serions leurs proies. » Hammo Chero
convoque les cheikhs de la montagne et leur transmet les ordres du commandant. Il leur propose de rejeter <p.236> cette demande. Mais l’assemblée est partagée : les uns proposent de résister ;
les autres de se rendre. Hammo Chero exige un accord unanime. Les cheikhs se retirent dans deux villages voisins pour délibérer. Hammo Chero n’attend pas leur réponse. Il prend un petit groupe
d’hommes, parmi les plus pauvres de son village, et part harceler les soldats turcs. Il trouve un corps de soldats se reposant dans un khan au pied de la montagne et l’anéantit. Dans la nuit du
samedi au dimanche de Pâques 1918, la troupe ottomane investit la montagne. Elle traîne un canon et envoie un obus sur Cheib-el-Kassem, puis la troupe progresse. Chero et ses hommes multiplient les
embuscades, mais ils ne peuvent interrompre l’avance des soldats ottomans. Le cheikh se retire alors dans son village. Il convoque les chrétiens et leur conseille de quitter leurs maisons en emmenant
de quoi se nourrir et de se diriger vers le sud.
Les chrétiens partent en catastrophe, abandonnant tout. Les soldats atteignent Mamissa qu’ils pillent. Les maisons des chrétiens sont détruites.
épouvantés, les réfugiés gagnent les sommets de la montagne par des chemins d’accès difficile. Les soldats arrivent au village de Chero qu’ils pillent et incendient. Les Yézidis se rendent. Les Turcs
installent des services de police et une administration dans le Sindjar qu’ils évacuent peu à peu. Les Yézidis se ressaisissent et harcèlent les soldats restés dans leur montagne. Ils en tuent
quelques-unes et s’emparent de leurs armes. Les Turcs quittent le Sindjar. Les chrétiens poursuivent leur retraite jusqu’aux tentes des Arabes Taï qui les accueillent et les guident tant qu’ils les
paient. Ils laissent sur place ceux qui n’ont plus d’argent ou sont incapables de marcher. Certains cependant restent au Sindjar et regagnent les villages où ils habitaient. Ils vivent dans la peur :
« Ils sont comme celui qui est atteint par des flèches : à peine une blessure est guérie qu’il en reçoit une autre ». Le commandant ottoman, Mohyeddin bey, est arrêté sur dénonciation du cheikh Chero
et condamné par le vali de Mossoul pour pillage. Il a le choix entre verser 2 000 livres ou effectuer des travaux forcés pendant cinq ans : on le verra travailler à la voirie avec des ouvriers dans
les rues de Mossoul43. <p.237>
Léonard Melki 1881- 1915
Elias Loulou
Né à Tell-Armen en 1894, il fut arrêté et libéré en dernière minute. Il est l’un des 25 témoins au procès diocésain de Mgr. Ignace Maloyan. Il fut interrogé par Mgr. Antranik Ayvazian, vicaire
général de Kamichli des Arméniens catholiques, en 1986.
Je suis né à Tell-Armen. Je me rappelle de Mgr. Maloyan qui a été conduit avec d’autres Arméniens de Mardine sur la route entre Mardine et Diarbakr où ils furent fusillés.
Toutefois, une centaine de personnes ont été épargnées, puis ramenées à Mardine à la suite d’un ordre impérial.
Moi-même j’ai été arrêté avec d’autres Arméniens de Tell-Armen et conduit à Ras-el-Ayn où un Yazidi est venu nous chercher, moi et quatre cousins, et nous a sauvés.